Article de Toinette Arrabie, Consultante Senior et Mariana Lagneau, Directrice Adjointe - The Boson Project
Les métiers de la Relation Client bousculés
Les métiers de la relation client sont touchés depuis une quinzaine d’années par la digitalisation de notre société.
Celle-ci a certes contribué à améliorer l’expérience client, pour aujourd’hui atteindre des niveaux d’accompagnement sur-mesure et de qualité de lien jamais vus, mais en habituant le client à de nouveaux standards elle l’a encouragé quelque part à se montrer beaucoup plus exigeant.
L’impact de notre époque sur les métiers est assez nettement perçu par les 350 professionnels de la Relation Client qui ont déclaré dans une enquête menée par The Boson Project pour l’AFRC en 2022, que depuis 2020 le travail s’était complexifié (51% d’accord), intensifié (67% d’accord) et digitalisé (76% d’accord). Sans pour autant avoir gagné en intérêt : seulement 35% décrivent le travail comme plus stimulant depuis 2 ans.
Et à l’heure même où il est nécessaire de recruter des collaborateurs engagés pour répondre à des attentes client plus exigeantes, les tensions sur le marché du travail éclatent. Lors de la rencontre AFRC du 2 février, à la question “À quoi pensez-vous en premier lorsqu’on vous dit recrutement ?”, les réponses dessinent une situation pour le moins difficile avec des mots comme “galère”, “compliqué”, “difficultés”, “concurrence”.
La difficulté actuelle du recrutement peut être expliquée d’une part par des éléments conjoncturels, comme le rattrapage de la mobilité dans les métiers qui n’a pu se réaliser durant les années chamboulées par la COVID et qui impacte donc le turn-over des entreprises. D’autre part, le rapport au travail des français a évolué pour laisser plus de place aux aspirations personnelles et ainsi dessiner un nouvel équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle.
Dans une étude menée par The Boson Project en octobre 2021 auprès de dirigeants d’entreprise, 86% d’entre eux étaient plutôt d’accord ou tout à fait d’accord pour dire que, par rapport à 2019, il est devenu plus difficile de recruter. Et ce, indépendamment du secteur et de la taille de l’entreprise.
Dans cette même étude, beaucoup expliquent la difficulté à recruter par un changement radical dans le rapport de force employé / employeur obligeant les entreprises à revoir leurs offres, à revaloriser leurs salaires ou à repenser les conditions de travail. La question du recrutement n’est que la pointe de l’iceberg du sujet de l’engagement. Il convient donc de questionner non seulement son attractivité mais ses leviers de fidélisation.
Du parcours candidat à l’expérience collaborateur, voici un résumé de bonnes pratiques identifiées par les professionnels du secteur de la Relation Client.
Des atouts des métiers de la relation client sur lesquels capitaliser pour améliorer leur rayonnement
Les métiers de la Relation Client ont une carte à jouer pour gagner en attractivité. Lors de l’enquête sur le futur des métiers de la relation client, les répondants déclaraient être attachés à leur métier à 4,2/5 avec un rapport presque passionnel à la Relation Client.
Comment sublimer ces atouts pour mieux attirer ?
Les experts de l’expérience collaborateur et membres de l’AFRC résument les avantages du métier autour de deux piliers.
Tout d’abord l’utilité : atout majeur à l’heure de la crise de sens généralisée du travail. Le sentiment d’utilité immédiate est apporté par les missions de support, de conseil et de réponse à des millions de français au quotidien et permet de rendre concret le besoin de sens.
Le deuxième avantage est celui de l’apprentissage. Les compétences et savoir-être nécessaires pour gérer la relation client permettent de développer son employabilité, son autonomie voire sa débrouillardise et surtout ses savoir-être à l’heure où les savoir-faire ou hard skills semblent de plus en plus rapidement obsolètes.
Après avoir attiré, comment recruter ?
Une fois l’attractivité et les avantages mis en avant, c’est tout le parcours du candidat qu’il faut améliorer.
Aujourd’hui il apparaît souvent trop long et complexe par rapport au niveau de rémunération proposé. L’explication de cela repose sur le besoin de mesurer justement les savoir-faire du candidat dans une optique de diminuer les risques d’erreurs. Toutefois la solution se trouve peut-être moins dans la robustesse des process de recrutement que dans l’intégration et la montée en compétences de la nouvelle recrue.
Ainsi, pour rendre les process de recrutement plus efficaces, certains organisent des immersions avec double-écoute ou des entretiens collectifs avec cas pratiques afin de tester le candidat tout en lui donnant à voir le métier. L’implication des managers opérationnels dans le recrutement est également vue comme clé pour sa réussite.
Deuxièmement il est nécessaire d’apporter plus de transparence au candidat afin de mieux anticiper les différentes étapes et ne pas le laisser sans nouvelles, même en cas de réponse défavorable pour ne pas abîmer la marque employeur.
Le troisième axe d’amélioration dans le process de recrutement est le rayonnement de l’entreprise pour la rendre plus attractive et faciliter la projection du candidat. Dans ce sens, l’organisation d’échanges avec les membres de l’équipe et des vis-ma-vie peuvent être de bonnes pratiques.
Enfin un point peu exploré pour bien recruter mais qui semble clé : la cooptation par des pairs avec prime à la clé.
Le besoin de réinventer l'expérience collaborateur pour mieux fidéliser
Une fois le candidat recruté, il s’agit ensuite de le fidéliser pour maintenir son engagement et renouveler sa motivation dans le temps. Parmi les bonnes pratiques identifiées dans le secteur nous retrouvons :
• Développer la reconnaissance individuelle ou collective, certains allant jusqu’à imaginer des “prix” thématiques ou autres programmes de mise en valeur des collaborateurs.
• Miser sur un solide parcours de montée en compétences et une stratégie GPEC pour faire bénéficier une formation continue et que la promesse d’employabilité et d’évolution soit tenue.
• Renforcer le management en l’outillant sur le feedback, l’animation collective et l’accompagnement individuel.
• Mettre en place des dispositifs d’écoute type baromètres pour prendre le pouls des collaborateurs et anticiper un éventuel désengagement.
•Animer le collectif avec un vrai souhait de créer davantage de liens au sein des espaces de travail et d’impliquer les collaborateurs dans les projets de l’entreprise.
•Pour cela, il peut être intéressant de s’intéresser aussi aux espaces de travail, qui ont la capacité de faciliter convivialité et collaboration et peuvent représenter un réel vecteur de différenciation.
• Dernier sujet, moins criant aujourd’hui mais certainement clé demain : repenser la flexibilité possible de ces métiers longtemps soumis à des contraintes horaires et de performance très serrés. Comment permettre d’aller plus loin dans l’autonomie et l’organisation du travail ? Tout un chantier à explorer pour travailler en profondeur l’attractivité et la soutenabilité du métier.
Conclusion
Alors que les 350 répondants de l’enquête Futur des métiers de la relation client ont exprimé un fort attachement au métier (moyenne de 4,2/5) et témoigné des multiples facettes qui entretenaient leur attrait pour ce métier, les difficultés de recrutement que l’on observe illustrent l’image dont pâtissent une partie des métiers. Il s’agit alors, pour lever ces a priori, d’investir le sujet de l’expérience collaborateur pour mieux bâtir et valoriser sa marque employeur et dès demain se différencier sur le marché de l’emploi.
À vos marques, prêts… on s’y met !